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Lectures paresseuses
7 octobre 2014

Quand donner la mort est un métier

  

61Nis4ap70L

"Dans la forêt, un grand feu brûle, autour duquel les hommes du NKVD se réchauffent, fument, boivent de la vodka, plaisantent. Ils ne sont pas impressionnés, ils ont l'habitude, ils travaillent pour les camps du canal, et le canal est un grand mangeur d'hommes. Ils ont creusé plusieurs fosses, pas très grandes, trois ou quatre mètres sur deux. Ils ont une vingtaine, il y a d'autres camarades un plus loin. Certains sont ivres. Il y a d'autres fosses un peu plus loin, fraîchement refermées, la terre retournée fume encore dans l'air froide. Le feu fait danser de grandes ombres sous les arbres, des tourbillons d'étincelle montent entre les troncs. Les gardes descendent des camions, demandent du monde pour décharger. Il faut se dépêcher, on n'a pas de temps à perdre, les camions doivent retourner à Medvejégorsk pour une autre fournée, ils ne seront pas de retour avant deux heures. on tire les suppliciés, on les fait tomber des bennes, comme des rondins, on les traîne par terre, ils sont nus ou en linge de corps, les bourreaux ont des vestes ouatinées et des chapkas, ils se moquent d'eux comme des hommes bien vêtus peuvent se moquer de ceux qui vont mourir, comme les centurions romains se moquaient du Christ . Les chiens aboient, excités. Le capitaine Matveïev finit sa cigarette, jette le mégot dans le feu, boit un coup de vodka, s'essuie la bouche, saute fans la fosse, arme son Nagant."

p.180/181,"Le météorologue"(2014), Olivier Rolin, Seuil

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