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Lectures paresseuses
19 septembre 2008

Mc Ewan ou le basculement d'une vie

     Plutôt sur la réserve à l'égard de l'auteur (les louanges de Télérama encourageant la prudence), Ian McEwan, je me suis aventuré à lire "Sur la plage De Chesil", le dernier opus de cet écrivain anglais. Dans l'Angleterre de l'après-guerre, Edward et Florence se marient arrivés chacun chaste avant leur nuit de noces; la consommation du mariage se transformant en fiasco, le couple ne survit au mystères de cette nuit. L'exploration minutieuse, heures par heures, minutes par minutes, secondes par secondes de cette implosion se conclue dans une déchirante interrogation sur ce qui constitue un destin, sur ce grain de sable où tout s'oriente, la finale du roman se renferme sur une mélancolie déchirante:

41GHAKHR1JL"Lorsque qu'il pensait à elle, il n'en revenait pas d'avoir laisser partir cette jeune femme et son violon. A présent, bien sûr, il se rendait compte que sa proposition de s'effacer pour lui laisser sa liberté était assez insensée. Elle voulait juste avoir la certitude qu'il l'aimait, être rassurée, l'entendre dire que rien ne pressait puisqu'ils avaient la vie devant eux. Avec de l'amour et de la patience- si seulement il avait pu avoir les deux en même temps-, sans doute auraient-ils surmonté cette épreuvre ensemble. Qui sait alors quels enfants jamais nés auraient pu avoir leur chance, quelle gamine avec un bandeau dans les cheveux aurait pu devenir sa fille chérie ?Voilà comment on peut radicalement changer le cours d'une vie: en ne faisant rien. Sur la plage de Chesil, il aurait pu appeler Florence, s'élancer pour la rattraper. Il ne pouvait pas, ou ne voulait pas savoir qu'au moment où elle s'enfuyait, sûre dans sa détresse qu'elle allait le perdre, jamais elle ne l'avait aimé plus fort, plus désespérément, et entendre le son de sa voix aurait pour elle une délivrance, et elle serait revenue sur ces pas. Au lieu de quoi il était là, glacial et muet, sûr de son bon droit, dans ce crépuscule estival, à la regarder fuir le long de la grève, tandis que le bruit de sa course laborieuse  se perdait dans celui du ressac, jusqu'à ce qu'il ne reste plus d'elle qu'un point flou, toujours plus petit, sur l'immence route de galets, droite et luisante dans la lumière blafarde."

p.149
,"Avec de l'amour et de la patience- si seulement il avait pu avoir les deux en même temps-, sans doute auraient-ils surmonté cette épreuvre ensemble.", superbe accent paulinien.

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