Le sacré des sociétés occidentales depuis 1948
Nous autres, sommes résolument étrangers à cette religion civile de substitution qui voudrait effacer le sacrifice de la Croix, mais apprécions la franchise de l'auteur pour ce qui constitue la sacralité occidentale:
"La Constitution est l'englobant de l'Américain, comme le Coran du musulman, la Torah du juif; comme le sont, pour nous tous Occidentaux, la Shoah et Auschwitz. Que ce soit le "mur des Lamentations", le tombeau de Lincoln ou de Kennededy; la pierre noire de La Mecque ou la mosquée d'Al-Quod: dans aucune civilisation - et la chinoise elle-même, société sans théologie, n'échappe pas à la règle _ le lieu du sacré ne peut rester longtemps vacant. La place de l'interdit: occupant aléatoire, occupation nécessaire. Si l'on ne connaît pas de société dépourvue d'un ciment qui à la fois ses membres entre eux et à une valeur reconnue par eux; ou, si ce qu'une communauté historique sacralise, (la chose morale traduisant la chose vitale, et la conservation des valeurs suprêmes, l'instinct de conservation du vivant), est cela et seulement cela qui la fait exister comme communauté identifiable et durable, il n'est pas étonnant que l'ensemble des sociétés euro-atlantiques communie dans et par la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948."
p.99-100, "L'Emprise", Régis Debray, Gallimard-Le Débat 2000