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Lectures paresseuses
6 février 2010

Déroute de l'armée napoléonienne à Vilnius

     "Le 9 décembre,  un jour blafard venait de se lever sur les campagnes ensevelies sous la neige et le vent du nord soufflait gal040avec une rigueur inouïe, quand on commença à remarquer une noire colonne qui semblait s'avancer du Nord et dans la direction de Vilna. Comme elle se rapprochait de minute en minute, on put bientôt reconnaître une masse confuse d'hommes, de traîneaux et de chariots. A n'en pas douter, c'étaient les restes de la grande armée ! A l'aide d'une longue-vue, on les examinait avidement, le coeur serré de surprise et de douleur: plus de rangs, plus de drapeaux, à peine quelques armes; rein qui rappelât une organisation militaire, une armée en marche. Ce n'était qu'une longue suite de groupes informes, assemblés au hasard; des malheureux qui, la tête baissée, se soutenant à peine sur la neige endurcie et glissante, se traînaient à l'aide de branches d'arbre, les uns derrière les autres, comme hébétés par la fatigue, le froid et les souffrances de la faim. Ils revenaient quarante mille au plus; c'étaient les survivants de quatre cent mille hommes ! Ceux que l'on ne voyait pas, couchés sous la neige, formaient de puis Moscou jusqu'à Vilna une épouvantable traînée de cadavres et marquaient la trace du conquérant en délire que la main de Dieu avait frappé...A chaque instant, plusieurs tombaient pour ne plus se relever et achevaient leur agonie sur le sol glacé...Il est difficile que les hommes assistent jamais à un plus lamentable spectacle !
    Dans l'immense désordre de cette fuite, dans cette tourbe misérable, il était impossible de reconnaître ces fiers soldats tant admirés quelques mois auparavant. C'étaient à peine des hommes. On les considérait, non sans effroi, sous leurs indescriptibles haillons, avec leur teint hâve, leur barbe hérissée, leurs yeux hagards qui n'exprimaient plus que des appétits brutaux.La vie morale semblait éteinte en eux, à force de misère; il ne leur restait qu'un instinct, l'instinct de conservation."

p.40, "En Lithuanie Souvenirs d'un proscrit
"(1920-30 ?), Oeuvre Saint Charles de Grammont

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