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Lectures paresseuses
26 mars 2014

La tentation démiurgique du communisme

 

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"Appelé à comparaître devant diverses commissions, j'avais pu fournir, par dizaines, les motifs qui m'avaient amené au communisme, mais ce qui, dans le mouvement, m'avait par-dessus tout fasciné, ensorcelé même, ç'avait été le volant de l'Histoire près duquel je me suis trouvé (ou ai cru me trouver). En effet, nous décidions alors réellement du sort des gens et des choses; et cela justement dans les universités: comme en ces temps les membres du Parti au sein des assemblées professorales se comptaient sur les doigts d'une seule main, les étudiants communistes, au cours des premières années, assumaient à peu près seuls la direction des facultés, décidant des nominations de professeurs, de la réforme de l'enseignement comme des programmes. L'énivrement que nous goûtions est appelé d'ordinaire griserie du pouvoir, cependant (avec un grain de bonne volonté) je pourrais choisir des mots moins sévères: nous étions envoûtés par l'Histoire; nous étions ivres d'avoir senti son corps sous nos fesses; dans la plupart des cas, ça finissait par tourner par une vilaine soif de puissance, mais (de même que toutes les affaires humaines sont ambiguës) il y avait en même temps là-dedans la belle illusion que nous inaugurions, nous, cette époque où l'homme (chacun des hommes) ne serait plus en dehors  de l'Histoire ni sous le talon  de l'Histoire, mais la conduirait et la façonnerait."

p.114/115," La plaisanterie"(1967), Milan Kundera, Folio n°638

Résumé sur Amazon:

"L'optimisme est l'opium du genre humain ! L'esprit sain pue la connerie. Vive Trotski !" : première plaisanterie de Ludvik, qui lui vaut d'être exclu du Parti Communiste à l'unanimité. Seconde plaisanterie, de la vie cette fois : des années après sa radiation, Ludvik tente de se venger d'un des membres du parti qui s'est montré particulièrement dur, en lui volant sa femme, qui s'avère ne plus lui appartenir depuis longtemps déjà. La vengeance a donc échoué. Cependant, d'une plaisanterie à l'autre, Kundera nous aura offert un bijou d'humour noir, mais aussi une réflexion brillamment illustrée sur l'unicité des choses et des êtres, ponctuée d'évocations superbes des coutumes moraves, d'incursions dans le monde absurde du totalitarisme communiste et d'introspections lucides. En alternant savamment les points de vue de Ludvik, Helena, Jaroslav et Kotska, Kundera semble nous signifier qu'au bout du compte, c'est l'idée même d'individu qui lui importe.

 

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